Actualités 28 juin 2023

Ce n’est pas en torpillant les rachats et les restructurations que l’on obtient des entreprises saines !

Si le ministre de l’Économie et du Travail obtient gain de cause, les restructurations mais aussi les transferts d’entreprise (ou d’une partie d’entreprise) deviendront bientôt une mission quasiment impossible. Il souhaite en effet revoir en profondeur aussi bien la loi Renault que les règles relatives au transfert d’entreprise (aujourd’hui entièrement régi par la CCT 32bis). Son seul objectif est de rendre le processus extrêmement complexe, beaucoup plus long et structurellement plus coûteux, ce qui pourrait empêcher bon nombre d’entrepreneurs de garantir la survie de leur entreprise.

Les motifs de cette initiative politique sont assumés et notoires :  cet avant-projet de loi s’inspire du dossier Delhaize et vise principalement à renforcer le rôle des syndicats tant lors des restructurations que des reprises et rachats d’entreprises. Dans notre monde en pleine transition, qui contraint parfois les entreprises à changer totalement de cap pour être plus fortes et assurer ainsi notre prospérité, une telle intervention législative sera contre-productive. Les exemples ci-dessous illustrent l’aveuglement et la vision étroite de l’auteur de l’avant-projet de loi. La période au cours de laquelle le nombre de licenciements est analysé pour déterminer si une entreprise procède à des licenciements collectifs sera doublée, passant de 60 à 120 jours. En d’autres termes, le seuil d’un licenciement collectif avec toutes les obligations qui y sont liées (voir la loi Renault) sera atteint beaucoup plus rapidement. Autre nouveauté : l’obligation formelle de convenir d’un plan social avec les syndicats. Ces derniers ont ainsi les coudées franches pour faire traîner les négociations et en tirer le meilleur parti, puisque cette nouvelle obligation rend inopérant le délai légal de 30 jours. En prime, l’entreprise devra fournir une analyse d’impact à tous les sous-traitants et co-contractants avec lesquels elle entretient une relation commerciale d’une certaine importance (achats annuels de 300 000 EUR pendant cinq ans et 30 % du chiffre d’affaires annuel) et impliquer tous les représentants des travailleurs dans la procédure d’information et de consultation. Vous voyez déjà le topo : tout le monde aura son mot à dire sur l’ensemble du processus, car cela pourrait fort bien concerner une centaine d’entreprises. Et cette analyse d’impact  ? En tant qu’entreprise, vous n’avez aucune information sur les activités et le personnel d’un tiers, ces données étant d’ailleurs strictement confidentielles et protégées (à juste titre  !) par le secret d’affaires et le RGPD pour ce qui concerne les travailleurs. En matière de transfert d’entreprise, un nouveau mécanisme sans précédent dans l’ordre juridique est sorti du chapeau : en tant que cédant, vous êtes conjointement et solidairement responsable de toutes les dettes envers les travailleurs transférés qui surviennent après le transfert. En d’autres termes, vous signez un chèque en blanc, car vous n’avez pas voix au chapitre, ni aucun impact sur la politique du cessionnaire après la reprise. En plus de tous les risques existants (qui vont bien au-delà de ceux liés aux ressources humaines), le cédant s’expose donc à un risque totalement incalculable. Qui se lancerait dans un tel processus ? Ici aussi, tous les représentants des travailleurs du cédant et du cessionnaire ont leur mot à dire dans le processus d’information et de consultation, avec pour objectif final la conclusion d’accords en faveur du personnel transféré. Un tel processus — qui est impossible à mettre en œuvre dans la pratique — est la chronique d’une mort annoncée. Cette initiative législative aura surtout pour effet que les entreprises ne pourront plus assurer leur survie à l’avenir et que la Belgique reculera encore dans le classement des pays où il fait bon investir. On attend désespérément des mesures qui renforceront enfin la compétitivité de nos entreprises. Il faut arrêter le tsunami de décisions qui visent uniquement à protéger davantage les travailleurs et qui asphyxient notre économie. En revanche, il est urgent de rétablir l’équilibre en adoptant à nouveau une attitude positive à l’égard de l’entrepreneuriat.
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